Trois ans. Trois ans que j’attendais un nouveau roman de Richard Morgan. Avec Black Man cette attente est enfin récompensée et bien récompensée.
Avant de s’envoler pour les terres de la fantasy, avec sa trilogie actuellement en cours outre-Manche, Morgan nous revient donc avec un nouveau roman assez proche de sa trilogie Kovacs. On navigue une fois encore dans les eaux du thriller cyberpunk, avec violence, corruption, sexe, argent, pouvoir et compagnie. L’univers dans lequel se passe l’histoire est sensiblement différent de celui de Kovacs et un peu plus proche du notre.
On se retrouve donc au début du XXIIème siècle, en un futur où certaines organisations supra-nationales ont en partie surpassé les pouvoirs des états. Les États-Unis ont subit plusieurs sécessions, certains états côtiers ayant quitté une union qui prenait une direction trop puritaine à leur goût. La colonisation de Mars a débuté et la planète sert de terre d’exil pour certains indésirables dont la majeure partie des individus génétiquement modifiés. Parmi eux on trouve la variante treize, des hommes dont on a plus ou moins tenté d’éliminer la sociabilité et les inhibitions à la violence dans l’espoir de créer des sortes de super-guerriers. Évidemment le projet ayant été abandonné pour cause de résultat non conforme aux espérances, les variantes treize se sont vu déclarés illégaux sur Terre. Lorsque l’un d’eux revient de Mars et commence à semer des cadavres comme le Petit Poucet ses cailloux on fait appel à l’un des rares treize autorisés sur Terre : Carl Marsalis, dont la raison d’être est tout simplement de pourchasser ses semblables.
Dès les premières pages je me suis trouvé plongé dans un univers à la Morgan. Le goût de son écriture m’est revenu aussitôt, comme un met dont on aura pas gouté depuis longtemps et dont l’arôme vous fait saliver dès la première bouchée. Je retrouve un univers fouillé, riche et finalement assez vraisemblable sur certains points, car pas tellement éloigné de la réalité. Comme bien souvent dans ce genre de récit les apparences sont parfois un peu trompeuses.
La trilogie Kovacs était raconté à la première personne. Cette fois on passe à un récit à la troisième personne, essentiellement centré sur Carl Marsalis mais qui ne dédaigne pas les autres points de vue. Morgan maitrise bien les scènes d’action, c’est violent, ça fait mal quand ce n’est pas carrément mortel et en plus on en redemande. Mais au-delà d’un thriller, parce que c’en est un, Morgan arrive à poser quelques questions sur ce que l’avenir nous réserve et notamment sur la façon dont on risque d’appréhender les êtres humains issus de manipulations génétiques, chose qui finira bien par arriver quelque soit les interdictions que l’on impose dans ce domaine.
Au final on a un récit bien emmené par de l’action et des rebondissements correctement dosés, allié à des personnages pas désagréables à suivre, le tout relié à des thématiques SF intéressantes et bien utilisées. Résultat : on passe du bon temps et on se pose deux trois questions sur ce à quoi pourrait bien ressembler notre futur. Que demander de plus ?
Note : Cet ouvrage a fait l’objet d’une nouvelle chronique à l’occasion d’une relecture.
Black Man (Black Man)
de Richard Morgan
traduit par Cédric Perdereau
illustration de Jean-Sébastien Rossbach
éditions Bragelonne/Milady
576 pages (grand format) 765 pages (poche)
disponible en numérique chez 7switch