Ce mois-ci Fleuve noir, par le biais de la collection Rendez-vous ailleurs, nous offre un peu de hard-science avec Vision aveugle de Peter Watts.
Canadien d’origine et formé à la biologie des mammifères marins, Peter Watts s’est d’abord illustré avec Rifters, une trilogie de SF consacrée aux grands fonds marins. Pour les anglophones notons qu’il est partisan de la licence Creative Commons et que la plupart de ses écrits sont disponibles directement sur son site.
Parlons maintenant un peu de Vision aveugle. Disons le tout de suite c’est de la hard science particulièrement ardue. Watts fait appel à de nombreux domaines et la dizaine de pages d’explications techniques en annexes illustrent pleinement le volume de documentation consultée par l’auteur.
La trame principale tourne autour d’une affaire de premier contact, un grand classique de la SF, où une expédition est envoyée aux confins du système solaire pour rencontrer ce qui semble être un objet d’origine extra-solaire. Autour de cette expédition Watts ajoute toute une série d’éléments hard-science, avec une dose de post-humain sous diverses formes, assez intéressantes pour la plupart. De la renaissance du vampire aux personnalités multiples, en passant par la chambre chinoise de Turing c’est varié et ça ne manque pas d’idée.
Indépendamment les uns des autres les différents éléments sont plutôt bons et intéressants mais mis ensemble la mayonnaise ne prend pas vraiment. Et c’est bien là le principal défaut du livre, à mon goût. On s’enferre par moment dans ce que la hard-science a d’hermétique avec un propos pas toujours accessible au néophyte et qui demande une lecture très attentive de certains passages. Là où un Baxter reste clair pour quelqu’un ne disposant pas d’un bac + 3 en physique, même s’il faut reconnaitre que Baxter a un peu plus de bouteille que Watts dont j’espère qu’il s’affinera un peu avec le temps.
Maintenant nuançons tout de même cette critique, le livre n’est pas mauvais et sa construction est plutôt bien agencée, les flashback sur le passé du narrateur m’ont paru rythmer correctement l’ouvrage et les petits passages où Siri, le narrateur en question, essaye de projeter le lecteur en lieu et place d’un protagoniste ou d’un autre sont une belle idée qui reflète assez bien la fonction du personnage.
Finalement j’ai un peu une sensation de gâchis. Avec des ingrédients d’une telle qualité j’attendais de la cuisine trois étoiles du guide Michelin d’où une certaine déception à n’avoir qu’une bonne table du guide du routard. En partie la faute des différents éditeurs français dont j’avais lu les avis très enthousiastes, y compris les concurrents de Fleuve Noir.
Je lirai avec plaisir un autre ouvrage de Peter Watts parce qu’il y a vraiment un potentiel chez ce bonhomme, d’autant plus qu’il n’est pas impossible que sa trilogie Rifters, portée elle par une thématique un peu plus originale que le ‘premier contact’, soit traduite à son tour.
Vision aveugle (Blindsight)
de Peter Watts
traduit par Gilles Goullet
illustration de Sparth (grand format)
collection Rendez-vous Ailleurs (grand format)
éditions Fleuve Noir / Pocket
344 pages (grand format) 448 pages (poche)
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Une réflexion sur « Vision aveugle, de Peter Watts »