Dans la lignée des séries centrées sur les vampires ou les assassins/voleurs, en voici une qui réunit les deux éléments : Assassini du britannique Jon Courtenay Grimwood. Le récit a pour cadre la Venise du début du XVème siècle, dans une version uchronique puisque la descendance de Marco Polo dirige la cité depuis quelques décennies.
Au milieu des intrigues de palais, on suit le parcours d’un jeune homme à l’origine incertaine, découvert muré dans un bateau en début de récit. Le jeune homme est propulsé au milieu d’une lutte de pouvoir à la tête de la ville, ainsi qu’en marge des relations houleuses que Venise entretient avec ses divers voisins.
Le décor choisi par Grimwood est tout à fait sympathique. La cité lacustre offre quelques belles descriptions et le cadre politique permet des intrigues complexes. En y ajoutant la situation géopolitique alentour, avec l’empire Ottoman, le Saint-Empire Romain Germanique, la famille Médici à Florence et la horde mongole de Tamerlan un peu plus loin à l’est, on obtient un tableau assez alléchant.
Et le livre serait effectivement très agréable si l’auteur parvenait à tirer profit de ce que je cite plus haut. Le problème réside dans à peu près tout le reste. L’intrigue tout d’abord. Le récit est assez désordonné et en plusieurs occasions je ne savais plus quel personnage parlait dans une discussion, les gens entrant et sortant des scènes parfois un peu trop discrètement à mon goût.
Les personnages ensuite. J’ai pu constater sans soucis aucun que chacun a ses propres plans pour l’avenir et que les alliances entre eux changent au gré des circonstances. Mais d’une façon générale, leurs motivations ne sont pas claires du tout. Et pas d’une façon qui donne envie de s’intéresser un peu plus à eux pour bien les cerner, mais plutôt en donnant l’impression que l’auteur ne sait pas lui-même ce qui les anime.
Enfin, certaines séquences vues par le biais d’une sorte de vision vampirique ne sont pas très parlantes, aussi peu lisibles que les scènes de dialogues ou certaines scènes d’action où Grimwood se contente d’empiler les adjectifs pour faire sentir la puissance des loup-garous et vampires.
Le côté un peu fouilli de l’écriture se trouvait déjà dans les romans de SF de Grimwood, mais cela correspondant mieux au genre qu’il affrontait, le cyberpunk, et me semblait moins prononcé.
Bref, l’idée de fond était intéressante et le décor adapté et alléchant, mais ce bon matériau est gâché avec ce que l’on pourrait presque appeler du talent si ce n’est pas aussi malheureux à voir. A priori tout ceci devrait avoir une suite, qui se passera clairement de moi.
Lamme damnée (The Fallen Blade)
de Jon Courtenay Grimwood
traduit par Sylvie Delloye
illustration de Benjamin Carré
éditions Bragelonne
384 pages (grand format)
Si vous voulez quand même tenter l’aventure, vous pouvez toujours le trouver par ici.