J’ai beau avoir un nombre incalculable de séries en cours, je résiste rarement à la tentation d’en commencer une nouvelle. Ainsi, je me suis assez facilement laissé tenter par Le héraut de la tempête, premier volume de la série Havrefer du britannique Richard Ford (à ne pas confondre avec son homonyme américain lauréat du Pulitzer). Voyons un peu ce que vaut le début de cette nouvelle série.
Havrefer met en scène la cité du même nom et quelques uns de ses habitants. Pendant que le roi est parti au loin pour essayer de repousser des hordes d’envahisseurs, diverses choses se trament dans la cité, du plus haut lieu du pouvoir jusqu’aux plus obscures ruelles. Sept personnages nous permettent de suivre tout ça.
Le héraut de la tempête voit l’essentiel de son action se passer dans la cité, on n’assistera donc pas à de grandes batailles dans les plaines, comme c’est le cas dans La Cité de Stella Gemmell. Mais Ford a pas mal de choses à raconter dans sa cité pendant que des événements lointains se déroulent en marge du récit. Les personnages que l’on suit répondent à certains archétypes : la princesse, la voleuse, l’assassin, l’ancien guerrier, l’escroc, la guerrière et l’apprenti magicien. Et c’est régulièrement sous cette forme que je pensais à eux en lisant plutôt qu’à leurs noms respectifs.
Ça se lit sans déplaisir, mais je trouve qu’il y manque quelque chose, un ingrédient qui ferait le petit truc en plus. J’ai l’impression d’avoir surtout lu un empilage de stéréotypes sans véritable originalité. De plus ce premier volume n’est finalement qu’une longue mise en place et que rien n’est résolu à la fin. Il faudra attendre une suite pour voir les choses commencer à évoluer un peu sérieusement. C’est pour moi un vrai défaut et je trouve que ce premier volume aurait pu bénéficier d’une bonne cure d’amaigrissement et se résumer aux cent cinquante premières pages d’un ouvrage qui ferait plus avancer l’intrigue.
On sent que l’auteur essaie d’explorer le plus d’aspects possibles de sa création, mais cela conduit à un empilement qui alourdit probablement un peu trop l’ensemble. On a finalement beaucoup de points de vue pour des personnages qui vivent tous dans la même ville. Alors les personnages n’arrêtent pas de se croiser sans s’en apercevoir, ça a son charme mais c’est tout même assez inutile. George R. R. Martin utilise peut-être huit points de vue dès A Game of Thrones, mais les siens sont répartis en différents endroits, ce qui a plus de sens. Certaines situations particulièrement clichés m’ont aussi un peu fait grincer des dents, comme celle des amants secrets tellement grotesque que j’ai presque refusé d’y croire pendant un moment.
J’y ai tout de même trouvé quelques éléments intéressants. La vision de la noblesse plus intéressée par la prise du pouvoir par mariage interposé que par la réalité (la menace d’un siège) et celle des hauts-mages plus prompts à ne rien faire plutôt qu’à prendre une décision sont assez bien rendues. Et en fin de compte, c’est l’intrigue concernant la magie qui m’a paru le plus intéressant de tout l’ouvrage.
Le héraut de la tempête est donc un premier volume avec pas mal de défauts et pas assez de qualités pour compenser. Virer une partie des personnages, raboter un peu les clichés et enfin faire de tout ça la première partie d’un livre et non un premier volume complet rendrait le truc nettement plus intéressant. Bref, je ne suis pas convaincu que je lirai la suite. Pour ceux qui veulent un premier volume de trilogie avec une cité d’un côté et une horde barbare de l’autre côté, je conseille vivement Les couleurs de l’acier de K. J. Parker, un vrai roman complet et pas un simple prologue. Sinon, on peut aussi aller faire un tour du côté de La Cité de Stella Gemmell, livre qui n’est pas dénué de défaut mais où les qualités compensent largement et qui ne nécessite pas de lire une suite quelconque.
Le héraut de la tempête (Herald of the Storm)
de Richard Ford
traduit par Olivier Debernard
illustration de Benjamin Carré
éditions Bragelonne
480 pages (grand format)
Disponible en numérique chez 7switch
Complètement tout à fait d’accord, je te rejoins sur tous les points de ta critique, du coup je lirai sûrement jamais le 2…