En fouillant un peu dans mon vaste stock de bouquins non lus, je suis tombé il y a quelques temps sur les deux premiers volumes d’une trilogie de SF francophone : Quantex écrit par Ludovic Albar. Et comme mon humeur s’y prêtait plutôt pas mal à ce moment là, j’ai décidé de me lancer dans la lecture du premier volume, Le songe des immortels. Albar m’a-t-il permis de retrouver espoir dans le space-opera français après les déceptions que sont Dominium Mundi et Le Melkine ?
XXXe siècle, l’humanité a colonisé tout le système solaire et même mis un pied autour d’une autre étoile. Mais loin d’être unie, elle est divisée en de nombreuses entités politiques, régulièrement agitées par des conflits internes ou externes. Et lorsqu’une menace terroriste commence à gêner sérieusement les institutions terriennes, ces dernières font appel à leurs alliés martiens pour leur envoyer un de leurs meilleurs agents afin d’infiltrer le réseau de dissidents.
En regardant rapidement l’objet avant de le lire, on peut voir outre la couverture de Manchu (pour l’édition grand format) une petite annexe en fin de volume listant quelques données sur les entités politiques qui se partagent le système solaire ainsi que des citations, parfois un peu longues, au début de chaque chapitre. Visiblement l’auteur a voulu se conformer à quelques habitudes que l’on trouve dans certains ouvrages de SF, notamment dans la série Dune qui est une source d’inspiration manifeste pour Quantex. Les citations de début de chapitre offrent l’avantage de pouvoir introduire des éléments spécifiques à l’univers sans couper le récit en cours de chapitre pour des explications techniques. Cependant, Albar en fait parfois trop et certaines citations auraient mérité d’être raccourcies, ce qui les rendrait plus efficaces. Les sources des citations mériteraient aussi un peu d’élagages, lister le catalogage complet de chaque ouvrage me parait en l’occurrence assez superflu. Bref, quitte à s’inspirer de Dune, autant en utiliser certains éléments aussi efficacement que possible plutôt que de les alourdir inutilement.
J’ai aussi trouvé que certains personnages étaient un peu trop archétypaux et par moment Albar use un peu grossièrement de certains clichés. On n’échappera donc pas à quelques retournements de situation que l’on voit venir d’un peu loin. Enfin, ce premier volume prépare beaucoup de choses, mais il en laisse peut-être un peu trop en plan pour la suite. Depuis quelques temps, je suis devenu un peu plus sensible sur l’utilité de découper des histoires en plusieurs romans sans véritablement “conclure” chaque volume.
Mais Quantex n’a pas que des défauts. Reconnaissons-lui tout de même quelques qualités. Tout d’abord la richesse de l’univers développé. Albar ne se contente pas d’une opposition entre deux entités politiques comme on le voit un peu trop souvent. Son système solaire est multiple, les jeux d’alliances y sont donc primordiaux et ce premier volume offre déjà pas mal d’évolution dans le paysage géopolitique. Cela offre un peu de surprise au lecteur et ça donne de la crédibilité à son univers. Ici, les factions ne sont pas monolithiques mais bien constituées d’individus aux intérêts pas toujours parfaitement convergents. En dehors de ces problèmes politiques, l’univers que propose Albar est assez riche, quantité de petits détails sont là et on voit qu’il a consacré du temps à élaborer le tout. La richesse se retrouve aussi dans les couches d’intrigues qu’Albar a empilé. Le point de départ pouvait donner lieu à un récit assez simple et linéaire, mais l’auteur a su l’élargir en multipliant les points de vue et les fils narratifs, sans en faire trop et noyer le lecteur sous un enchevêtrement d’intrigues.
J’ai assez longuement parlé de certains défauts de ce premier volume mais le bilan est clairement positif pour moi. Les points soulevés plus haut m’agacent un peu mais sont largement supplantés par le plaisir que j’ai pris à lire Le songe des immortels. Je pense que l’ouvrage aurait certainement pu gagner un peu en qualité moyennant quelques retouches mais le résultat actuel est plaisant et contrairement à Dominium Mundi et au Melkine, je vais en lire la suite.
Le songe des immortels
de Ludovic Albar
illustration Manchu / David Lecossu
éditions Mnémos
448 pages (grand format) 448 pages (poche)
Youhou, un space-opera français « adoubé » par Herbefol ! \o/