Quelque part dans les limbes de ce blog se trouve une chronique de l’écorcheur de Neal Asher. Ce roman de space-opera m’avait assez plu et je comptais bien continuer à explorer l’univers dans lequel il s’inscrit. Mais un seul autre roman dans l’univers du Polity, intitulé Drone, est disponible en français. Et vu que l’éditeur actuel de l’auteur, Fleuve Noir, ne semble pas trop décidé à en publier d’autres, le dernier étant arrivé en 2010, j’ai décidé de passer directement à la VO. Et par la même occasion de lire les ouvrages dans l’ordre de parution d’origine, qui n’a pas grand rapport avec l’ordre dans lequel deux d’entre eux ont été traduits. Bref, j’ai fini par me lancer dans la lecture de Gridlinked de Neal Asher.
Ian Cormac est un agent du Earth Central Security, l’organe de sécurité du Polity, l’organisation qui préside à la destinée de la majeure partie de l’humanité. Et lorsque le runcible (sorte de téléporteur) de Samarkand connait une défaillance, entrainant la destruction de la colonie humaine qu’il desservait, c’est à Ian Cormac que l’on fait appel pour enquêter. Mais son travail précédent, la répression d’agents séparatistes, va le rattraper alors qu’il doit faire face à un défi sans précédent pour lui : travailler sans interconnexion permanente à l’IA de l’ECS.
Si l’écorcheur se passe exclusivement sur une seule planète, Gridlinked offre une perspective plus large puisque l’on va se promener à travers quelques mondes différents. On est dans du space opera un peu mâtiné de cyberpunk, puisque Ian Cormac est clairement un individu câblé de partout. C’est d’ailleurs là dessus que repose une partie de l’intrigue puisque Cormac est connecté en permanence à un réseau depuis des décennies et qu’on lui impose au début de sa nouvelle mission de ne plus travailler de façon connecter. A lui de se débrouiller pour obtenir des renseignements de façon plus conventionnelle, comme par exemple demander leur nom aux gens qu’il rencontre. L’idée d’utiliser un protagoniste en cours de sevrage de réseau est intéressante, surtout vu de notre époque où certains vivent connectés quasiment en permanence aux réseaux sociaux. On connait tous quelqu’un qui est en permanence rivé à son téléphone pour ne pas rater un nouveau statut, un sms ou que sais-je encore. En imaginant la même chose, mais avec une connexion directe au cerveau, je vois assez bien l’ampleur que la dépendance pourrait produire chez certains. Bref, Cormac doit donc jouer avec un handicap et c’est assez intéressant à suivre.
En dehors du protagoniste principal, on croise évidemment d’autres personnages, dont un représentant du Polity aussi énigmatique qu’omniscient, et un activiste séparatiste, Arian Pelter, dont on suit régulièrement le point de vue. Ce dernier est tout à fait détestable. C’est l’exemple typique du personnage qui estime que tout doit s’incliner sur son chemin et que seul son point de vue importe. Bref, un protagoniste qui va permettre au lecteur de le détester facilement.
Le bouquin est assez bien rythmé au niveau action et l’univers n’est finalement qu’égratigné. On sent qu’il y a matière à beaucoup plus et je suppose qu’Asher doit nous en dire plus sur le Polity, son fonctionnement, ses limites, etc. dans les autres volumes qu’il a consacré à cet univers – treize bouquins à ce jour. On évolue un peu dans les mêmes eaux que certains Richard Morgan – en particulier Anges déchus – ou que la série Cassandra Kresnov de Joel Shepherd. Et après cet essai en anglais satisfaisant, je compte bien continuer.
J’avais bien aimé l’Ecorcheur pour sa faune et son concept dépaysants, et je trouve dommage qu’on ait pas cherché à traduire le roman suivant de la « Spatterjay sequence », même si nombre d’avis de lecteurs VO déplorent que l’auteur n’ait pas exploité adroitement le filon. Peut-être que la fidélisation du lecteur francophone aurait fonctionné…Drone était trop moyen, décevant dans ses scènes d’action qui n’exploitaient d’ailleurs guère les ressources de la SF (ma grosse frustration à l’époque de la lecture). Et puis c’est un préquelle, à lire en principe « après « Gridlinked ». J’aurais toutefois voulu lire d’autres romans de Neal Asher, pour être fixé.
Je soupçonne que Fleuve Noir ait publié Drone pour ensuite enchaîner sur Gridlinked (et qu’ils ont probablement laissé tomber par manque de vente). A partir du moment où j’avais décidé de passer à l’anglais je suis revenu à l’une de mes vieilles habitudes : lire dans l’ordre de parution d’origine. J’ai donc encore quelques titres à lire avant de pouvoir livrer un avis sur Drone. Prochaine étape : The Line of Polity. 🙂
Drone est d’un extrême classicisme.