L’idée du voyage dans le temps n’est pas récente et les auteurs ont exploité l’idée en long, en large et en travers depuis plus d’un siècle. Christophe Lambert utilise plusieurs fois ce concept, notamment dans le premier des romans qu’il publia dans la défunte collection Rendez-Vous Ailleurs des éditions Fleuve Noir : La brèche. La couverture de Manchu suffisait à elle seule à me vendre l’ouvrage et en dépilant récemment des livres non lus, j’ai décidé de m’occuper enfin de celui-là.
KWN est une chaîne de télé américaine qui a trouvé le truc pour se démarquer de la concurrence et faire monter l’audience : pouvoir utiliser une technologie (sous contrôle militaire) permettant de remonter le temps. L’émission phare consiste donc à faire assister les auditeurs à un moment historique, comme si la chose avait lieu en direct. Mais le public se lasse facilement et les responsables de la programmation cherchent quel événement ils vont bien pouvoir proposer pour relancer la machine.
La brèche est un roman qui démarre assez rapidement et qui garde un bon rythme jusqu’au bout. Lambert a une écriture fluide, peut-être « héritée » de sa carrière en tant qu’auteur jeunesse. Le thème des émissions télévisées lui permet de proposer quelques chapitres écrits comme des scripts de tournage, ce qui contribue à renforcer l’immersion dans ce monde où tout est question de plan bien cadré. Les deux personnages principaux sont un brin caricaturaux mais d’une certaine façon cela cadre avec l’idée de fond puisqu’ils ont été sélectionnés par la production pour participer à cette émission spéciale. Quand on voit parfois la subtilité dont font preuve les diffuseurs dans leur sélection pour leurs programmes de téléréalité…
On sent que Lambert a bien révisé ses ouvrages d’histoire avant de se lancer dans l’écriture de La brèche. Les détails historiques sont nombreux et l’auteur fait son possible pour que le lecteur plonge dans le passé et partage l’expérience des personnages. On repensera forcément à des films comme Le jour le plus long ou Il faut sauver le soldat Ryan pour peu qu’on les ait vus avant de lire l’ouvrage. Lequel a d’ailleurs la bonne longueur et la bonne dynamique pour fournir la base d’une adaptation cinématographique. Comme la couverture le laisse supposer, on va aussi faire un détour par le territoire de l’uchronie. Car la tentation d’aller voir le passé s’accompagne forcément du risque de le modifier et donc d’influer sur son époque de départ.
La brèche est un roman pas trop long qui se lit bien. Lambert n’évite pas quelques facilités mais l’ensemble constitue un bon divertissement avec une idée de départ intéressante et un fond historique documenté et bien rendu. Le genre de divertissement que j’aimerais lire un peu plus souvent. Et rien que ça ce n’est déjà pas mal.
La brèche
de Christophe Lambert
illustration de Manchu
éditions Fleuve Noir / Pocket
216 pages (grand format) 352 pages (poche)