Connie Willis est une auteur particulièrement gâtée par les prix, en particulier les Hugos, et elle est surtout connue pour sa série de romans sur le thème du voyage dans le temps. Si j’ai l’occasion peut-être que j’en relirai et en parlerai plus longuement une prochaine fois. Cependant, Willis est aussi l’auteur de nombreuses nouvelles et novellas et de quelques autres romans, moins connus. Je vais donc parler un peu de Remake, petit roman un peu oublié.
Alis rêve de devenir danseuse et de pouvoir s’illustrer en duo avec Fred Astaire. Ou à défaut de participer à une comédie musicale. Mais dans ce futur plus ou moins proche, on ne fait plus de films originaux, on se contente de remonter, triturer, mélanger les anciens. Et c’est le métier de Tom qui doit « nettoyer » les vieux films de tout ce qui n’est plus au goût du jour : tabac, alcool…
Le futur que propose Connie Willis donnera raison à ceux qui se plaignent que le cinéma, en particulier hollywoodien, se morfond dans une réécriture perpétuelle de ses classiques. Si ce n’est que l’auteur pousse l’idée encore plus loin. La technologie aidant, pourquoi tourner une nouvelle version d’un film passé quand on peut carrément le manipuler pour y remplacer un acteur, un décor ou tout autre élément ? Tout ça pour une fraction du coup d’un nouveau film. Plus besoin de nouvelles productions, on recycle carrément les anciennes. Et le mot de remake prend là un tout autre sens. On imagine assez facilement que la production d’œuvres originales en prendrait un coup. Willis présente assez bien certains travers de ce futur et on verra donc Tom passer une part non négligeable de son temps à placer la dernière copine en date de son chef dans quelques œuvres, avant de devoir la remplacer par la suivante.
A travers Remake, Willis n’offre pas qu’un regard critique sur la création artistique récente mais aussi un véritable chant d’amour au cinéma d’autrefois et en particulier à la comédie musicale. Les références sont nombreuses et une petite culture des classiques hollywoodiens peut apporter un plus à la lecture, la rendant assez visuelle. L’écriture de Willis est fluide et le texte en lui-même est relativement court, pour un roman. J’ai lu l’ouvrage en une seule journée et j’ai presque eu la sensation de voir un film.
Remake n’est certainement pas la meilleure œuvre de Connie Willis. C’est cependant un roman très agréable à lire, surtout si l’on dispose de quelques références sur le thème abordé. Et si l’œuvre est un prétexte à un bel hommage à toute une époque du cinéma hollywoodien, Willis livre quand même une belle petite intrigue. Le tout avec une jolie fin, un peu dans la lignée de l’âge d’or de la comédie américaine, le genre de choses magiques que l’on retrouve chez Frank Capra ou Ernst Lubitsch.
Remake (Remake)
de Connie Willis
traduit par Frédéric Serva
éditions J’ai Lu
192 pages (poche)
« le texte en lui-même est relativement court, pour un roman. » Et surtout relativement court pour un Willis ? 😀
On a une perception assez biaisée de l’œuvre de Willis en France. Elle a écrit d’autres romans à peu près aussi long que Remake, mais c’est le seul de cette épaisseur a avoir été traduit chez nous. Sans parler de toutes les novellas et nouvelles qu’elle a publié et dont seulement une petite partie est disponible en français. 🙂