J’ai déjà parlé à de multiples reprises sur ce blog et dans l’Agence Tous Geeks de David Brin et chroniqué plusieurs de ses livres. Après Le peuple d’argile, je n’avais plus de romans inédits de l’auteur (à l’exception de The Practice Effect, une vieillerie en anglais). La sortie en français de son dernier roman en date, Existence, est donc une bonne occasion pour moi de relire, en anglais, l’ouvrage et de vous en parler un peu plus en détail.
Dans l’espace comme sur Terre, l’homme a semé des déchets de toute sorte. Et les débris en orbite pouvant avoir des conséquences catastrophiques, on les récolte tant bien que mal. C’est le boulot de Gerald Livingstone, cantonné à jouer les éboueurs sur orbite pour une humanité qui se désintéresse de plus en plus des étoiles. Jusqu’au moment où il met la main sur un cristal qui semble venu d’ailleurs.
Le début de l’ouvrage laisse assez bien supposer qu’il va y être question du paradoxe de Fermi. Et sur ce sujet on ne sera pas déçu. Brin nous propose de multiples solutions au fameux problème et fournit donc amplement matière à réflexion dans ce domaine. Mais tout comme Terre, Existence est bien plus que cela. Avec ce roman, Brin nous livre à nouveau un portrait d’une humanité future, d’une société en pleine mutation. On suivra donc d’autres sujets, notamment l’organisation sociale, les dangers de l’innovation technologique, le développement des intelligences artificielles, etc. Ce livre contient probablement plus d’idées que l’œuvre entière de certains auteurs du genre.
Tout comme Terre, le volume de texte est imposant. Le récit est formé de chapitres jamais très longs, alternant différents points de vue et fil d’intrigue, le tout entrecoupé d’interchapitres qui développent différents aspects du monde, comme la communication par les réseaux sociaux, la singularité technologique, l’élévation, etc. On retrouve aussi certains thèmes déjà développés dans Terre, mais aussi dans d’autres œuvres de Brin, comme Le peuple d’argile. Il sera ainsi assez souvent question d’environnement (le grand défi de notre siècle) mais aussi de la société de la transparence, concept cher à l’auteur.
Si le texte n’est pas exempt de quelques longueurs, Brin a un style qui permet de le lire facilement. On trouvera dans Existence des dizaines de néologismes. Ayant lu l’ouvrage en anglais, je peux dire que dans cette langue le vocable créé par l’auteur est aisément compréhensible, tant chaque nouveau mot semble dériver naturellement de ceux que l’on connait et je ne serai pas surpris si certains finissent par faire partie du vocabulaire courant dans quelques décennies. Ce vocable permet de renforcer la vraisemblance de l’avenir que décrit Brin. Ayant jeté un petit coup d’œil à la version française, le traducteur semble avoir assez bien réussi à les retranscrire en français, ce qui n’est pas facile.
L’une des choses qui m’a plus dans ce roman c’est le fait que le message venu d’ailleurs que contient le cristal est multiple et incertain. Les réactions que propose Brin sont, je pense, assez proches de ce que l’on pourrait avoir en réalité. Il y a ceux qui embrassent le message sans hésitation, ceux qui le rejettent en bloc, les partisans d’un complot ou d’un canular et au milieu tous ceux qui veulent bien y croire un peu mais s’interrogent quand même sur l’honnêteté et les intentions des auteurs. Et sur ce point, les interrogations sont nombreuses. Qui est réellement derrière ce message ? Pourquoi l’ont-ils réellement envoyé ? Peut-on leur faire confiance ? Le message est-il d’origine ou bien a-t-il été manipulé par un intermédiaire ? Et que sont devenus les auteurs ? Pourquoi le message arrive-t-il maintenant et pas avant ? Le message est-il bénin ou y a-t-il un risque à le propager ? Bref, la simple possible existence d’un message venu d’ailleurs soulève quantité d’interrogations et Brin ne se prive pas de les pointer du doigt. Au lecteur de réfléchir en compagnie des personnages. On pourra naturellement reprocher à tout cela d’accroitre artificiellement la longueur du bouquin. Pourtant je pense que toute ces réflexions sont légitimes et nécessaires dans un tel cadre.
J’ai relu Existence à petite vitesse et ce fut un plaisir d’avoir chaque jour ma petite dose de l’ouvrage, avec toujours une nouvelle idée ou une réflexion intéressante à se mettre sous la dent. L’ouvrage est volumineux et certains accuseront certainement Brin de tirer à la ligne. Pourtant il me parait difficile de faire court vu l’ambition de l’ouvrage. Car au-delà du paradoxe de Fermi et du premier contact avec une civilisation extra-terrestre, sous de faux air de prélude au cycle de l’Élévation, Existence est surtout le portrait d’une humanité en pleine mutation. Un instantané d’un futur possible. Bref, c’est un livre très intéressant dont je recommande vivement la lecture.
Existence (Existence)
de David Brin
traduit par Claude Mamier
illustration de Yohann Schepacz
éditions Bragelonne
741 pages (grand format)
disponible en numérique chez 7switch
Je l’ai dans ma wish list celui-ci. Et c’est vrai que les quelques longueurs sont soulignées dans les critiques que je lis. Cela ainsi que que le qualité de la réflexion proposée. J’espère que les moments peu intenses ne sont pas trop nombreux et que l’histoire est prenante.
Pour moi, les réflexions et les idées de l’ouvrage compensent largement. On a quand même un mystère qui sert de fil rouge pendant tout l’ouvrage et si tous les fils narratifs ne sont pas enthousiasmant de façon égal, je trouve que le livre vaut vraiment par sa peinture d’une société humaine future et en mutation. 🙂