J’apprécie toujours de me lancer dans le dernier volume d’une série dont j’ai aimé les romans précédents. Je l’appréhende aussi un peu, par crainte que ce dernier volume ne soit pas à la hauteur du reste. On peut raconter la meilleure histoire du monde, si la fin n’est pas à la hauteur cela peut gâcher toute une partie du plaisir tiré des précédents épisodes. Voyons donc comme cela s’est passé avec La roue d’Osheim, dernier volume de la trilogie de La Reine Rouge de Mark Lawrence.
A la fin de La clé du menteur on quittait un Jalan qui venait de se faire happer dans les enfers à la suite de Snorri. Nous retrouvons donc Jalan à la sortie de sa visite dans le monde des morts : à moitié à poil en plein milieu du désert. Le prince va alors s’atteler à un objectif immédiat, survivre, et un objectif un peu plus lointain, rentrer dans sa bonne vieille contrée et ne plus en sortir, laissant ainsi sa grand-mère ou qui que ce soit d’autre régler les grands problèmes du monde. Son penchant pour tomber de Charybde en Scylla ne va lui faciliter la tâche.
C’est encore une fois un vrai plaisir de retrouver Jalan avec son ego et sa lâcheté. Le prince n’a pas perdu grand-chose de sa superbe et il sait bien rappeler à tous sa place dans le monde. Tout en sachant mettre de l’eau dans son vin dès qu’il est question de sa survie. C’est aussi un plaisir de retrouver Snorri avec son inaltérable foi en son comparse et son talent pour raconter son histoire. On voit d’ailleurs dans le roman le pouvoir que les histoires peuvent avoir et pas seulement celles de Snorri. On fait aussi la connaissance de quelques nouveaux personnages et on apprend à en connaître un peu mieux d’autres, le tout avec un certain intérêt. Il est aussi intéressant de voir de quelle façon Jalan continue à évoluer et pas seulement au contact de son principal compagnon d’aventure.
Lawrence met toujours aussi bien en scène son univers post-apocalyptique qui se prend pour un monde de fantasy. Je trouve particulièrement bon sa façon de faire interagir ses personnages avec les reliquats de technologie de la civilisation pré-apocalypse. Leur interprétation des propos que tiennent les entités avec lesquelles ils conversent sont une très bonne illustration de la troisième loi de Clarke : Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie. Son approche multiple des enfers est aussi intéressant, ou quand la culture dans laquelle on est élevé détermine le monde post-mortem que l’on subi.
Comme les précédents ouvrages de Mark Lawrence, La roue d’Osheim se lit rapidement. L’auteur nous propose une nouvelle fois une petite remise en situation en préambule à l’histoire et je trouve le procédé assez agréable. Cela évite ainsi à l’auteur de devoir alourdir son récit de rappel autrement sans intérêt et permet au lecteur de replacer rapidement les éléments importants. J’avoue que j’apprécierai volontiers que le procédé soit plus courant. Lawrence fait aussi partie de ces auteurs dont j’encadrerai bien certaines phrases tant elles sonnent bien. Cette trilogie se passant dans le même univers que celle de L’empire brisé, Lawrence n’a pas résisté à la tentation de faire se croiser Jalan et Jorg. Les deux princes se croisent donc une nouvelle fois dans ce volume et le premier met en pratique certains enseignements du second. J’aime bien ce genre de clin d’œil qui ne nécessite cependant pas d’avoir lu la précédente trilogie.
La roue d’Osheim clôt de façon satisfaisante la Reine Rouge. En deux trilogies, Mark Lawrence se sera imposé chez moi comme un auteur de fantasy avec lequel compter. Il possède une voix propre et a su développer un univers original peuplé de personnages entraînants. Sa nouvelle série se passant cette fois dans un nouvel univers, je suis bien curieux de voir de quel façon il parvient à rebondir, en espérant qu’il ne perd rien de ses qualités qu’il a su affiner de livre en livre. Réponse une fois que j’aurai lu Red Sister, premier volume du Book of the Ancestor.
La roue d’Osheim (The Wheel of Osheim)
de Mark Lawrence
traduit par Claire Kreutzberger
illustration de Victor Manuel Leza Moreno
éditions Bragelonne
480 pages (grand format)
disponible en numérique chez 7switch