George R. R. Martin est bien connu pour sa série de fantasy Le trône de fer, entamée il y a déjà un peu plus de vingt ans. Mais avant de publier le premier volume de cette saga, Martin avait déjà derrière lui plus de deux décennies de carrière en tant qu’auteur. Si certains de ses textes ont été traduit en français avant que le succès de sa série phare ne le fasse connaître plus largement, d’autres ont dû attendre que l’auteur soit nettement plus connus pour y avoir droit. C’est le cas du fixup Le voyage de Haviland Tuf.
Haviland Tuf est un marchand. Il parcourt l’espace avec son vaisseau et ses compagnons félins, à la recherche de marchandises à acquérir et surtout de clients susceptibles de lui offrir une marge intéressante. Il se retrouve ainsi embarqué dans une expédition, à la recherche d’une épave qui pourrait bien changer son existence.
Le voyage de Haviland Tuf est donc un fixup, c’est à dire un assemblage de textes plus ou moins courts publiés précédemment et regroupés pour former un récit unique, comme c’est le cas pour Les ferrailleurs du cosmos d’Eric Brown. Il s’agit ici de textes que l’auteur a écrit à la fin des années 1970 et au début des années 1980. L’univers décrit est assez générique, on est dans un space opera avec des systèmes stellaires colonisés un peu partout et différentes cultures et sociétés en fonction des planètes. Tuf se promène ainsi de système en système en essayant de résoudre un problème à chaque fois.
Les défis que relève Tuf sont parfois assez ardus et symptomatiques de l’espèce humaine. Le personnage se permet d’ailleurs quelques piques sur l’incapacité de cette dernière à réformer certaines habitudes. C’est d’autant plus intéressant qu’il s’agit souvent de question d’environnement et que certains des problèmes soulevés nous concernent directement.
Le personnage de Tuf est assez savoureux à suivre. Sous ses dehors d’ermite à chat qui apprécie beaucoup de faire bonne chère, Haviland Tuf cache un esprit que ses interlocuteurs sous-estiment bien souvent. Il est patient là où les autres veulent que tout aille vite et il souhaite faire du bon boulot quand on lui réclame de l’expéditif. Cela donne lieu à de nombreuses scènes d’agacements et l’occasion pour Tuf de parler à ses chats comme un comédien parlerait aux spectateurs en guise de monologue intérieur. Il utilise aussi des formulations et un vocabulaire qui semble parfois un peu désuet ou recherché, ce qui accentue le décalage avec ses interlocuteurs. Bref, c’est un régal.
Le voyage de Haviland Tuf est un space-opera fort agréable à lire. On est dans un pulp assez assumé et Martin arrive à donner un côté vancien à son récit, tant par l’humour qui se dégage par moment du récit que par la façon économe qu’il a de rendre le foisonnement de l’univers qu’il décrit. Le seul reproche que je peux y faire, c’est le choix d’une couverture pas très engageante dans l’édition poche française. Si un jour Martin décidait de retourner à ce genre de récit, je ne serai pas contre.
Le voyage de Haviland Tuf (Tuf Voyaging)
de George R. R. Martin
traduit par Alain Robert
illustration de Caza / Frédéric Sorrentino
éditions Mnémos / J’ai Lu
380 pages (grand format) 440 pages (poche)
J’étais déjà à peu près convaincu à « fix-up », mais la suite n’a fait que valider mon impression. Ça a l’air tout ce que j’aime : simple et efficace sans être dénué de fond. Je saurai passé outre la couverture si je le croise. ^^
Très sympa ce bouquin, de tout ce que j’ai lu de Martin (hors Trône de fer), c’est ce que j’ai plus aimé.