S’il n’est pas garanti que la nouvelle adaptation cinématographique du classique de Frank Herbert sorte réellement à la fin de cette année, ce projet est tout de même un bon prétexte pour relire Dune.
Le duc Léto Atréides est nommé comme nouveau gouverneur de la planète Dune, seule source de l’épice qui fait la richesse de l’empire. Mais cette nomination qui semble une récompense est en réalité un piège, monté par une maison concurrente : les Harkonnens.
Si l’ouvrage compte divers points de vue, l’histoire est quand même centrée sur Paul, le fils du duc Léto. Le récit a une structure un peu particulière, puisque certains retournements de situations (trahison, etc.) sont dévoilés en amont par les personnages. On rentre relativement bien dans la tête de ces derniers, Herbert développant assez largement leurs réflexions personnelles. La distribution est assez large, sans être pléthorique, et pas mal de ces personnages laissent un souvenir assez marquant au lecteur.
L’univers que développe l’auteur dans ce roman est riche. On voit assez rapidement qu’au-delà d’un affrontement un peu binaire entre Atréides et Harkonnens, il y a des enjeux politiques un peu plus complexes. Il y a aussi tout une dimension écologique intéressante. La découverte de tout ceci se fait sans grande difficulté, les informations arrivant petit à petit, généralement par le biais d’explication de personnage à personnage. Sans que cela fasse trop dialogue artificiel : la découverte de ce nouveau monde est autant celle du lecteur que de certains personnages. L’exploration d’Arrakis et la rencontre des Fremens sont pleins de petits détails qui montrent que l’auteur a pas mal réfléchi à ces questions. La présence à la fin de l’ouvrage de quelques appendices accentue cette dimension de livre-univers, à l’égal d’un Seigneur des Anneaux.
Le livre n’est pas sans défaut ou aspect qui pourrait rebuter certains lecteurs. Il faut consentir une certaine dose de suspension d’incrédulité, tant certains aspects de l’univers peuvent relever de la magie ou des super-pouvoirs. Il en faudra aussi un peu pour accepter sans sourciller un ou deux éléments clés de l’histoire (notamment une trahison). Certains lecteurs pourront aussi trouver au roman une tonalité plus fantasy que SF. Il y a quelques aspects qui me font un peu grincer des dents. Par exemple, certains personnages semblent capable de prédire, par calcul, les actions d’autrui, comme une variante personnelle de la psychohistoire. Ce que d’un point de vue mathématique je trouve complètement ridicule (alors que l’idée d’Asimov me parait plus crédible). Il y a aussi quelques trucs sur la génétique qui me faisait déjà froncer les sourcils à ma toute première lecture quand j’étais ado. Enfin, il y a quelques petits éléments dans l’intrigue dont l’explication est manifestement passée sous le tapis, ce qui est toujours un peu dommage.
Cette relecture s’est faite avec grand plaisir, même si ayant changé depuis ma lecture précédente je suis nettement plus critique sur certains aspects du livre. Je vois de plus en plus les défauts du truc. Cependant, l’ambiance de cet univers et le charisme de certains personnages font que ça reste quand même un plaisir à lire.
Dune (Dune)
de Frank Herbert
traduit par Michel Demuth
éditions Robert Laffont / Pocket
690 pages (grand format) 830 pages (poche)
disponible en numérique chez 7switch