Dans les ouvrages historiques, c’est comme dans l’imaginaire : heureusement que je ne lis pas que de gros pavés. Je profite aussi d’ouvrages moins volumineux et moins difficiles à tenir en main. Ce qui n’empêche pas d’aborder des sujets tout aussi sérieux. Comme par exemple avec Le procès de Nuremberg écrit par Annette Wieviorka.
L’autrice est une historienne qui a abondement écrit sur la déportation, la solution finale et les personnages plus ou moins liés à la deuxième guerre mondiale (Eichmann, le couple Thorez). Elle livre ici un ouvrage pas très long, mais très instructif, sur l’un des procès les plus connus et les plus singuliers de l’histoire.
Je connais assez bien la période concernée et un peu le procès mais je souhaitais en savoir plus sur son organisation et son déroulement. Le moins que je puisse dire, c’est que je suis bien servi.
L’ouvrage est organisé en huit chapitres qui s’intéresseront à différents aspects du procès. Comme toute bonne historienne, Wieviorka commence avant le sujet et présente donc la façon dont on est arrivé à l’idée d’un procès. Les futurs vainqueurs de la seconde guerre mondiale ont évolué à travers plusieurs idées, en passant par celle d’exécutions plus ou moins sommaires d’un nombre plus ou moins importants de dignitaires et cadres allemands avant d’en arriver à l’idée du procès.
On voit ensuite comment ce dernier s’organise. Qui juger ? Des organisations ? Des particuliers ? Qui représente les parties civiles ? On voit aussi pourquoi Nuremberg sera le lieu de ce procès historique. L’un des points clés de cet événement est le choix des chefs d’accusation. Ce sera la grande entrée en scène du crime contre l’humanité.
Wieviorka raconte le déroulement de ce procès et des événements qui vont en ponctuer le déroulement. Goering qui tente de briller par sa prestance. Les soviétiques qui essaient, piteusement, de mettre le massacre de Katyn sur le dos des allemands. La première diffusion d’un film sur le génocide. Les tentatives des différents accusés pour se dédouaner. L’historienne présente quelques extraits d’entretien avec des témoins, ainsi que des commentaires du psychologue qui s’entretenait régulièrement avec les accusés.
Puis vient le temps du verdict. Et si pour certains accusés ni la culpabilité, ni la peine requise ne font le moindre doute pour les juges, pour d’autres ce fut au contraire une âpre négociation. J’ai noté une petite erreur dans le table récapitulatif, où les chefs d’inculpation de Streicher sont vraisemblablement inversés avec ceux de Fritzsche.
Enfin, Wieviorka n’oublie pas de s’intéresser aux réactions au procès et à son verdict, mais aussi à sa postérité. Non seulement il ouvre la voie à toute une série de procès (procès des médecins, des juges, etc.) en Allemagne mais aussi au Japon (procès de Tokyo) et dans le reste de l’Europe (procès Touvier, Barbie, etc.) et du monde (procès Eichmann). Et au-delà des suites de la seconde guerre mondiale, il sert d’inspiration aux tribunaux pénaux internationaux sur la Yougoslavie et le Rwanda.
Cet ouvrage d’Annette Wieviorka est vraiment une lecture que je recommande vivement. Si l’on est totalement néophyte sur le sujet, l’autrice le rend très accessible sans faire un ouvrage trop volumineux. Pour ceux qui connaissent déjà le procès, c’est l’occasion de se replonger dans le sujet et probablement d’en apprendre un peu plus, tant ça foisonne de détails et d’informations, malgré la brièveté de l’ouvrage. Ce livre est un outil pour entretenir le souvenir d’une des pires atrocités de notre histoire, mais aussi se rappeler que tout le monde peut finir juger pour ses crimes. Une nécessité.
Le procès de Nuremberg
d’Annette Wieviorka
éditions Liana Levi
305 pages (poche)