Si parmi les ouvrages d’histoire militaire que je chronique il y a une bonne majorité de titres concernant la deuxième guerre mondiale, il est quand même question de temps en temps d’autres période, comme la première guerre mondiale, les guerres puniques, la guerre de Sécession ou les conflits de Louis XIV. C’est à l’occasion de la lecture de ce dernier ouvrage que j’ai eu envie d’en savoir plus sur la guerre de succession d’Espagne et notamment l’étrange bataille de Malplaquet. J’ai donc mis la main sur un livre d’André Corvisier consacré à cet événement.
L’auteur commence par présenter les sources dont disposent les historiens pour étudier l’événement, de quels types sont-elles, quelle est leur fiabilité, etc. Je trouve cette approche intéressante. On passe ensuite à la classique présentation de la situation. On présente rapidement le conflit et son déroulement jusqu’à l’année 1709. C’est l’occasion de voir que Louis XIV est en fâcheuse posture et a entamé des négociations avec ses adversaires. Mais ces derniers sont de plus en plus exigeants au fur et à mesure que le Roi-Soleil accepte les conditions, finissant par rendre tout accord impossible et la guerre se poursuit donc pendant l’année 1709.
Corvisier prend aussi le temps de donner un état des lieux des forces des deux côtés. On voit donc de quoi sont constituées les différentes armées et on fait connaissance avec leurs commandants. C’est l’occasion de voir que les généraux français qui ont dirigé les opérations dans la région des Flandres les années précédentes n’ont pas brillé face à un Marlborough et un Prince Eugène tout à fait compétentes. Cependant, les choses changent de ce côté puisque l’armée française va se retrouver dirigée par un nouveau tandem : Villars et Boufflers.
On passe ensuite au déroulé des opérations de l’année 1709, avec siège et mouvements des diverses armées qui tentent de se positionner le mieux possible, jusqu’au 11 septembre où les adversaires se retrouvent enfin face à face à proximité de Malplaquet. L’auteur présente le terrain, la disposition des forces au matin et enfin le déroulé de la bataille proprement dite. Une fois l’armée française opérant sa retraite, on voit les difficultés des alliés à exploiter cette occasion.
Enfin, Corvisier parle évidemment de l’après avec les conséquences de cette bataille sur la suite du conflit : les alliés qui s’attendaient à disposer d’un boulevard vers Paris pour en terminer une bonne fois pour toute se retrouvent coincés après une « victoire » qui leur a couté deux fois plus de pertes qu’au « perdant ». Dès son époque, la bataille est d’ailleurs perçue comme la plus couteuse de son temps, choquant une partie des soldats qui y participèrent. L’auteur présente aussi les réactions à la bataille et les controverses qu’elle a soulevé dès le lendemain. Du côté français, on critique vite les choix des deux commandants en leur reprochant de ne pas avoir tiré partie de certaines occasions pour remporter la victoire et la débandade de certaines unités pose aussi des questions sur leur qualité réelle. De l’autre côté, les hollandais pointent le fait que leurs troupes ayant encaissé la majorité des pertes ils ont la sensation d’avoir été sacrifié pour un résultat décevant. Corvisier discute un peu de la pertinence des différentes critiques.
Le principal défaut de l’ouvrage me semble les cartes, faites à la main et pas toujours très claires. Cependant, celles concernant la bataille elle-même restent relativement lisibles. Pour le reste, j’ai vraiment trouvé l’ouvrage intéressant. L’auteur n’en fait pas des tonnes pour étirer le texte mais il aborde bien les différents aspects, l’avant, le pendant, le comment et l’après. Si cette bataille est quasiment méconnue du grand public, elle est aux dires de Corvisier l’une des plus étudiées de l’histoire de France et je trouve que l’intérêt que j’y ai porté a été bien récompensé. « Victoire douteuse et glorieuse défaite » pour citer l’auteur, Malplaquet est d’une ambivalence que représente bien Corvisier.
La bataille de Malplaquet 1709
d’André Corvisier
éditions Economica
147 pages, plus annexes, bibliographie et index (grand format)