L’un des derniers ouvrages de Stephen Baxter dont j’ai causé ici était Stone Spring, premier volume de la trilogie Northland. Il est temps de continuer un peu cette série, avec le deuxième épisode : Bronze Summer.
On retrouve le même univers que dans le premier volume mais un peu plus tard. Enfin, beaucoup plus tard puisque plusieurs milliers d’années se sont écoulées et que l’on se retrouve à ce qui chez nous correspondrait aux environs de 1150 avant notre ère. Le monde a bien changé depuis le temps où la première digue fut construite à Etxelur, l’âge du bronze bat son plein. Mais des changements se profilent à l’horizon.
Cette série est une uchronie et si on voyait quelques changements évidents dès le premier volume, comme le fait que la Grande-Bretagne n’est pas séparée du continent, on ne voyait pas de différence au niveau de l’Histoire elle-même, ce qui n’était pas surprenant puisque l’action se passait avant l’apparition des premières civilisations laissant des traces écrites d’événements différenciables. Cette fois, ce n’est plus le cas. D’une part, on voit du côté d’Etxelur l’apparition de la culture de plantes venus de l’autre côté de l’Atlantique. On voit la même chose de l’autre côté de l’océan avec l’introduction de certaines espèces animales. D’autre part, en creusant un peu du côté de l’empire Hittite, on s’aperçoit que l’empire existe toujours à une époque où il a commencé à se déliter sérieusement chez nous. Bref, le côté uchronique devient plus flagrant et c’est fort intéressant.
Du côté des personnages, on retrouve à nouveau une galerie dont une partie appartient à la même famille, au sein des habitants de Northland, ainsi qu’un certain nombre d’étrangers à cette région. On retrouve des protagonistes qui ne sont pas vraiment à leur place dans le milieu où ils vivent (un classique de la littérature de façon générale) et une des habitudes de l’auteur : le/les personnage/s bouffé/s par une obsession et qui poussent tout une partie de l’intrigue à eux seuls.
Baxter pratique toujours le chapitrage court et n’hésite pas à sauter un peu dans le temps pour ne pas s’éparpiller ou trop se répéter. Dans l’ensemble, l’intrigue couvre un champ temporel un peu moins large que dans le premier volume mais suffisant pour voir quelques évolutions dans le monde proposé.
Le mur d’Etxelur n’était qu’à sa genèse dans Stone Spring. On le revoit après quelques millénaires d’extensions et d’améliorations et c’est devenu un édifice fort impressionnant. Les quelques idées que sèment l’auteur à propos de son importance dans la société d’Etxelur sont intéressantes, notamment son impact sur les rites funéraires. J’ai aussi apprécié la façon dont a évolué la civilisation du Northland, notamment les choix sur l’alimentation. Et puis il y a le Northland lui-même. Sa nature même de terre volée sur la mer le rend à part, avec un entretien permanent pour éviter que le mur ne s’abîme mais aussi la nécessité de maintenir un assèchement des terres gagnées pour qu’elles ne retombent pas à un état marécageux. Et si certains personnages sont très conscients de cette nature et de sa fragilité, d’autres l’ignorent totalement. Ce qui n’est pas sans impact sur l’histoire et j’ai vraiment apprécié cet aspect.
Le titre du volume porte l’attention sur l’âge du bronze, qui est effectivement la période à laquelle se passe l’intrigue, mais on voit déjà poindre celui du fer. Et c’est un aspect qui participe un peu à l’intrigue : la maîtrise de la fonte de l’acier n’est pas une innovation qui est apparu partout à la même époque. Cet élément m’a rappelé quelques passages de la trilogie Troie. D’ailleurs, la mythique cité fait son apparition dans l’ouvrage avec une approche assez historique.
Dans l’ensemble, on retrouve les défauts de l’auteur, dont des personnages parfois un peu taillés à la hache, mais que je trouve assez humain dans leurs défauts et leurs obsessions. Mais aussi ses qualités, à commencer par un soucis du détail dans la recherche sur son sujet et une vision assez globale des choses et de l’impact à grande échelle d’un élément qui parait parfois anecdotique. J’aime aussi toujours autant sa perspective historique. Les événements du premier volume ne sont plus que des légendes, déformées et auxquelles tout le monde ne croit pas. Enfin, j’apprécie beaucoup sa postface où il donne de nombreuses explications sur les choix qu’il a fait dans sa représentation de cette ère et les sources sur lesquelles il s’est appuyé. Reste maintenant à voir comment il va clore cette trilogie, avec un dernière volume logiquement intitulé Iron Winter.
Bronze Summer
de Stephen Baxter
éditions Gollancz
424 pages (grand format)