J’aime assez bien ce que produit Laurent Genefort. C’est donc un plaisir de le voir arriver dans la collection Albin Michel Imaginaire, d’autant plus qu’il s’agit d’un projet un peu différent de la plupart de ses romans. On ne se trouve pas dans son univers de space-opera mais dans une proposition alternative, inspirée par une création d’H. G. Wells : la cavorite.
Nous sommes dans les années 1920, dans un monde où l’on a découvert la cavorite : une roche qui permet de défier la gravité. Et c’est dans cet univers que Renée Manadier, jeune institutrice, arrive à Paris à la recherche d’un nouveau poste.
C’est tout un univers que nous propose l’auteur. La découverte à la fin du 19e siècle d’une substance défiant la gravité permet évidemment à l’humanité de se lancer à la conquête des airs et de l’espace de façon beaucoup plus précoce. Mais Genefort propose bien d’autres applications, avec un impact sur la vie quotidienne de tous et de toutes. Il n’oublie pas non plus que tout ça a forcément un impact sur l’histoire et les relations entre les états. La différence avec notre monde va cependant plus loin que la cavorite, puisque l’on s’aperçoit rapidement que Mars et Vénus sont ouvertes à la colonisation humaine et sans grand besoin de terraformation. On est donc clairement dans la continuité de la vision SF de l’époque H. G. Wells & Jules Verne, ce qui a un côté assez réjouissant.
Si Genefort utilise les nombreux détails qu’il parsèment dans le récit pour donner corps à son univers, il utilise la technique des extraits de textes imaginaires, ici principalement des articles de presse, pour proposer d’autres informations aux lecteurices. C’est une technique que j’apprécie beaucoup dans les univers imaginaires, quand elle est employée avec parcimonie, ce qui est le cas ici. Surtout que les textes semblent effectivement tout droit sorties de journaux de l’époque. C’est d’ailleurs une chose que j’ai aimé dans l’ouvrage : l’impression qu’on était bien dans les années 1920, avec les valeurs morales de l’époque.
L’auteur propose quatre fils narratifs principaux et si l’intrigue débute par l’arrivée de plusieurs protagonistes à Paris et qu’une partie semble de l’histoire s’y déroule, on va aussi voyager et pas qu’un peu. Parmi les points de vue proposés, l’un est parfaitement détestable et je l’ai trouvé très bien rendu, notamment dans le vocabulaire qu’il emploie. L’un des mystères du récit sera dévoilé avant la fin par l’un des protagonistes, mais j’ai trouvé intéressant de voir comment les autres personnages tentent de leur côté de trouver la solution.
Si l’on a lu au préalable l’abrégé de cavorologie qui accompagne cet ouvrage, on disposera déjà d’un certain nombre d’informations sur cet univers, mais je pense que le roman pourrait se lire sans aucun problème sans passer par cette étape préalable. Genefort est assez malin pour avoir écrit dans les deux cas un texte qui se suffit à lui-même, tout en se complétant sans trop de redite pour celles et ceux qui liront les deux.
J’ai donc pris beaucoup de plaisir à lire ce roman. Laurent Genefort a beaucoup travaillé sur cet univers, ses détails, l’utilisation de mots nouveaux, etc. sans pour autant perdre de vue le besoin de personnages qui tiennent la route et d’une intrigue pour relier tout ce petit monde. Et quand en prime du reste, c’est livré sous une magnifique couverture de Didier Graffet, ça constitue un très bon ouvrage.
Les temps ultramodernes
de Laurent Genefort
illustration de Didier Graffet
éditions Albin Michel
459 pages (format moyen)
disponible en numérique chez 7switch
Une réflexion sur « Les temps ultramodernes, de Laurent Genefort »