Parmi les époques qui m’intéressent un peu, il y a l’ère napoléonienne. Et si le personnage central de cette période est abondamment traité par la littérature historique, il est loin d’être le seul, tant cette période fourmille de protagonistes. Parmi eux, il y a la multitude de maréchaux ayant servi l’empereur. Si chacun d’eux a probablement déjà eu l’occasion d’être traité indépendamment, Walter Bruyère-Ostells nous propose un ouvrage les regroupant tous ensemble. Voilà qui m’intriguait.
Toute personne connaissant un peu la toponymie parisienne a déjà croisé les noms de Murat, Davout, Mortier ou Poniatowski. Parfois, on connait quelques noms de bataille qui leur sont associés. Mais personnellement, je n’en savais pas beaucoup plus, à part quelques détails spécifiques à l’un ou l’autre (notamment pour ceux dont l’histoire fini « mal », comme Murat, Lannes ou Ney).
Plutôt que d’adopter un plan où il traite chaque maréchal l’un après l’autre, l’auteur a préférer les grouper et les observer sous différents aspects. On va voir ainsi que s’ils ont tous une trajectoire personnelle, de leurs origines à leur fin, on peut régulièrement retrouver des similitudes entre certains d’entre eux. Ainsi de leurs origines et de leur carrière avant leur accession au maréchalat. Certains sont issus de noblesse avec quasiment dès la naissance une prédestination au métier des armes quand d’autres viennent de couches plus défavorisées de la société.
On voit aussi la diversité de leurs carrières militaires. Certains sont presque des étoiles filantes quand d’autres s’assurent une place sur le long terme. On note d’ailleurs que sur les vingt-six maréchaux d’empire, tous ne mènent pas des troupes au cœur des grandes batailles. Certains sont plus concentrés sur des fonctions d’état-major, voire d’organisation générale de l’armée. Cette diversité se retrouve aussi dans les raisons qui poussent Napoléon à les nommer à cette dignité. La chose est évidemment très politique. Ainsi, certains héritent du titre pas tant parce qu’ils sont des serviteurs loyaux et efficaces de l’empereur que parce qu’ils représentent une force politique à caresser dans le sens du poil.
Le rapport de fidélité à l’empereur est d’ailleurs à géométrie variable. Si certains lui resteront fidèle à peu près jusqu’au bout, quitte à le payer cher pour certains, d’autres n’hésiteront pas à faire passer leurs intérêts personnels avant et s’assureront des places intéressantes lors de la descente vers l’abîme du régime napoléonien. La palme dans ce domaine va probablement à Bernadotte, qui récupère le trône de Suède et dont les descendants sont toujours à la tête du pays.
L’auteur propose aussi de s’intéresser un peu en détail à un certain nombre d’opérations militaires et à la part des différents maréchaux dans le succès, ou l’échec, de ces dernières. On observe là encore la multiplicité des parcours, avec ceux qui font parfois preuve d’un génie insolent, ceux qui semblent moins inventif mais pourtant pas moins efficace, etc. C’est aussi l’occasion d’observer les interactions entre maréchaux et voir ceux qui trouvaient un bon modus operandi commun et ceux qui au contraire avaient trop d’incompatibilité pour travailler correctement ensemble.
Enfin, la fonction de maréchal ne se limite pas à la conduite de troupes et d’opérations militaires. Ils sont souvent appeler à administrer des territoires, une fonction où les résultats seront évidemment très variés. La fonction étant honorifique, elle s’accompagne aussi d’une vie sociale en principe importante, avec une présence à la cour impériale et tout ce que cela peut entraîner d’intrigues et de jeu de pouvoir. L’auteur propose aussi de s’intéresser à la vie familiale et affective de ces personnages. Là aussi, sans surprise, on verra tout un panel, du coureur de jupon inlassable au mari attaché et fidèle.
Avec ce livre, on fait la connaissance d’une sorte de classe sociale très limitée et qui au-delà des points communs qui la définissent présente une assez grande diversité. J’ai beaucoup apprécié le choix d’une organisation thématique de l’ouvrage et je l’ai lu assez rapidement avec grand intérêt.
Les maréchaux d’empire
de Walter Bruyère-Ostells
éditions Perrin
380 pages, dont notes et bibliographie (grand format)
disponible en numérique chez 7switch