L’œuvre créée par Lovecraft a inspiré beaucoup de continuateurs, avec une production assez volumineuse et une qualité très variable. Et Kij Johnson, dont j’ai beaucoup apprécié son Un pont sur la brume, s’est prêtée à l’exercice avec la novella La quête onirique de Vellitt Boe.
Vellitt Boe est professeure au collège pour femmes d’Ulthar et mène une vie tranquille. Jusqu’au jour où l’une des étudiantes disparaît. Fugue ? Enlèvement ? La professeure par à sa recherche, une véritable quête puisqu’elles vivent dans la Contrée des rêves.
Dans cet novella, l’autrice prend clairement le contrepied des textes de Lovecraft sur la Contrée des rêves : le personnage principal est une femme, le point de départ n’est pas notre monde mais celui de la Contrée des rêves, etc. Et il est très plaisant de voir ce genre d’approche, quand elle est bien réalisée ce qui est le cas ici.
L’univers de la Contrée des rêves n’est pas ma partie préférée de l’œuvre de Lovecraft. Le fait que j’y ai accédé par le biais de la vieille traduction pleine d’erreurs et d’approximations honteuses a dû jouer, mais le récit lui-même que produisait l’auteur contenait un peu trop d’éléments qui me freinaient. Notamment en ce qui concerne les chats, qui faisaient office de deux ex machina vraiment grotesque à mes yeux. Je suis plus amateur de ses horreurs cosmiques indicibles. Bref, Kadath et la Contrée des rêves n’étaient pas un environnement qui me plaisait tant que cela. Heureusement, Kij Johnson a fait un très bon boulot de ce côté et j’ai vraiment apprécié son interprétation de cet univers.
L’inversion de perspective est très utilisée dans cette novella. L’idée d’une fuite vers notre monde est évidemment envisagée et il est intéressant de voir notre ici comme un ailleurs. L’exploration de la Contrée des rêves m’a semblé aussi beaucoup plus digeste sous la plume de Johnson que sous celle de Lovecraft. Et le récit aboutit à une situation intéressante, dont l’autrice pourra toujours faire le point de départ d’un nouveau récit si l’inspiration la guide à nouveau sur ce terrain.
Cette novella très plaisante est servie en français par une édition de qualité : pages de garde en forme de carte en couleurs de la Contrée, nombreuses illustrations intérieures de Nicolas Fructus. C’est un plaisir de l’avoir lu.
La quête onirique de Vellitt Boe (The Dream-Quest of Vellitt Boe)
de Kij Johnson
traduit par Florence Dolisi
illustrations de Nicolas Fructus
éditions Le Bélial
191 pages (format moyen)
disponible en numérique chez 7switch