Le domaine historique est comme celui de la fiction : on y trouve des anthologies, même si elles sont rarement présentées sous ce terme, regroupant plusieurs essais autour d’une thématique. J’en ai déjà chroniqué plusieurs ici et en voici donc une nouvelle, sur l’idée des derniers combattants avant la défaite finale.
L’antho contient en tout vingt-cinq textes, organisés chronologiquement de la mythique bataille des Thermopyles, en 480 avant notre ère, jusqu’à la bataille de Kobané en 2014, dans le Kurdistan syrien. Chaque texte dispose de sa petite bibliographie et de quelques notes. Les auteurs sont assez variés et ne sont pas tous historiens, on trouve aussi des journalistes, écrivains, etc. Je retrouve dans la liste plusieurs noms connus dont j’ai déjà parlé ici : Vincent Bernard, Rémy Porte, Jean Lopez…
Certains sujets sont assez familiers pour le grand public, notamment par l’intermédiaire du cinéma : les Thermopyles, le « dernier samurai », les cathares de Montségur, etc. Mais à moins d’avoir une culture historique vraiment très développée, on fera forcément des découvertes dans cet ouvrage. La fin de la guerre civile irlandaise en 1923, les maquis antisoviétiques des Pays Baltes dans les années 1940-1950 (voire un plus tard), l’agonie de Trébizonde le dernier avatar de l’Empire Byzantin… Les propositions sont variées et souvent intéressantes.
Au niveau qualitatif, c’est très variable. Dans quasiment toutes les anthologies, quelles soient de fictions ou d’essais, il y a une variation de qualité d’un texte à l’autre mais l’échelle de valeur n’est pas forcément très importante. Ici, le pire côtoie vraiment le meilleur. La palme du texte le moins bon revient sans discussion à celui de Mathieu Bock-Coté sur Pontiac et le combat des amérindiens après la défaite française pendant la guerre de Sept Ans. Cet essai démarre par une diatribe sur la repentance, la bienpensance, etc. il ne manque que le mot « woke » pour avoir un bingo du vieux con réac. Et le reste du texte n’est pas bien meilleur : on ne saura pas grand chose de Pontiac, ni des combats menés par son peuple contre les colons anglais. Je suis capable de lire des textes écrits par des auteurs marqués à droite, pour peu qu’ils produisent des résultats historiques intéressants (et il y en a dans ce livre), mais si le reste ne suit pas, ça n’a vraiment aucun intérêt.
A l’autre bout de l’échelle, on trouve des essais comme celui de Vincent Bernard, consacré à Stand Watie, dernier général confédéré à se rendre à la fin de la guerre de Sécession et qui présente la particularité d’être le seul général amérindien de la guerre. L’historien nous présente bien le personnage, ses origines, sa vie avant la guerre, son engagement dans le conflit, etc. De même, les opérations militaires qu’il a mené sont exposées avec un minimum de détails. Et on termine par son destin après le conflit. C’est détaillé, c’est précis, il y a un contexte, un avant, un après, etc. Bref, c’est du bon travail et c’est très intéressant. J’ai aussi eu beaucoup d’intérêt à lire le texte sur les derniers combats de l’armée française au printemps 1940 ainsi que celui sur les dernières redditions de troupes allemandes après le 8 mai 1945.
Bref, voilà une anthologie qui contient son lot de bons, voire très bons textes, sur des sujets intéressants et parfois originaux, mais où les pépites sont mélangés avec du tout venant et surtout un ou deux essais vraiment mauvais.
Le dernier carré
anthologie dirigée par Jean-Christophe Buisson & Jean Sévillia
éditions Perrin
400 pages (format moyen)
disponible en numérique chez 7switch