J’ai parlé ici d’un très bon ouvrage sur la Bataille de l’Atlantique. Les convois de l’Arctique y sont bien sûr traités, mais le sujet était plutôt annexe du propos global du livre. Je suis donc content d’avoir trouvé un ouvrage centré sur ces fameux convois.
L’auteur commence par situer le contexte global et les prémices de ces batailles dans l’Arctique. En particulier le rôle de l’opération Weserübung (invasion du Danemark et de la Norvège) et de la menace qu’elle fait peser sur les convois de l’Atlantique. La prise de contrôle de l’Islande par les alliés est bien expliquée. Viennent ensuite quelques explications sur les phases « Cash and Carry » puis « Prêt-bail » de l’aide américaine.
On passe ensuite à une présentation du terrain, l’océan Arctique et les différentes bases qui s’y situent, en particulier le port de Mourmansk qui va être au centre de l’histoire par la suite. Enfin, Boris Laurent fait le panorama des forces en présence, en n’oubliant pas la marine soviétique qui est un acteur à part entière de ce drame.
Vient alors le 22 juin 1941, le déclenchement de Barbarossa et les premières réflexions sur comment aider l’Union Soviétique à survivre à l’attaque allemande. L’auteur n’oublie pas de parler des différentes routes possibles pour l’aide (corridor persan, route du Pacifique) et en quoi la route de Mourmansk présente un intérêt qui va justifier de tenter d’y faire passer de nombreux convois.
Car la route est particulièrement dangereuse. Non seulement la marine et l’aviation allemande vont tenter d’empêcher le passage des convois. Mais la zone concernée est aussi le foyer de conditions météorologiques, tant au niveau température que vent, qui vont rendre très difficile la traversée notamment en hier. Or, c’est en cette saison que les convois seront le plus amené à circuler. Car pendant l’été, la durée du jour avec un soleil qui se couche peu, voire pas du tout, rend très compliquée la protection des convois qui ne peuvent alors pas échapper aux attaques aériennes.
L’auteur présente bien les différentes phases de cette longue bataille. Les interruptions de circulation des convois lorsque les conditions sont trop mauvaises pour les alliés. Les évolutions, tant dans leur protection que dans les tactiques employées par les allemands. Les atermoiements de ces derniers quand à l’usage de leurs grosses unités de surface : faut-il les risquer pour porter un coup mortel à un convoi ou les garder à l’abri de la Home Fleet britannique et de son aviation ? Les grandes opérations de débarquement en Méditerranée et en Europe ponctionneront aussi ponctuellement les moyens de protection.
L’auteur parle aussi d’opérations terrestres. Non seulement à travers l’occupation de la Norvège en début de conflit puis par la prise de contrôle de l’Islande par les alliés. Mais aussi par les offensives que tenteront les allemands et leurs alliés finlandais, pas toujours très enthousiastes, pour prendre Mourmansk ou en couper au moins la liaison ferroviaire. En vain. On découvre aussi les différentes opérations autour du Spitzberg et de l’Île aux Ours. Enfin, j’avoue être assez étonné de découvrir que la marine allemande avait mené des opérations au large de la Nouvelle-Zemble et jusqu’en mer de Kara, dans une vaine tentative de couper le passage du Nord-Est.
Enfin, l’auteur fait le bilan de ces convois. Étaient-ils nécessaires ? Ont-ils aidé à faire pencher la balance ? L’ouvrage se termine avec quelques annexes, sur les pertes des sous-marins et des navires, la quantité d’aide transportée par les convois, l’organisation de ces derniers, l’aide maritime à l’Union Soviétique et quelques cartes qui aident à situer l’action.
L’ouvrage n’est pas très long mais bien riche en information. Il m’a rappelé par moment le roman HMS Ulysses, publié en 1955 et écrit par Alistair McLean qui a participé à la protection de certains des convois arctiques et qui devint par la suite un auteur de thriller dont une partie se passe dans la zone arctique (Nuit sans fin, Destination Zebra – station polaire, etc.) Le fait d’arriver à apporter de l’aide par le biais de cette route si dangereuse, tant du fait de l’ennemi que des éléments, semble un exploit et Boris Laurent le fait tout aussi bien ressentir que MacLean.
Les batailles arctiques
de Boris Laurent
éditions Economica
185 pages, dont annexes et bibliographie (grand format)