Tom King a réalisé un long run sur Batman, plus de quatre-vingt numéros. Mais il a ensuite surtout travaillé sur des séries plus limitées et centrées sur des personnages moins emblématique de son éditeur : Mister Miracle, Supergirl : Woman of Tomorrow, Rorschach, Human Target, Danger Street, etc. Mais récemment (enfin l’année dernière), il est revenu sur une série à longue durée et consacrée à l’un des personnages les plus importants du catalogue de DC Comics : Wonder Woman. Appréciant beaucoup le personnage, je n’ai pas hésité à m’intéresser à ce nouveau run.
Après un prologue se passant dans le futur et mettant en scène Jon Kent en Superman, Damian Wayne en Batman et introduisant le personnage de Trinity comme fille de Wonder Woman, on revient dans le présent où suite à une bagarre de bar une amazone tue plusieurs hommes. L’événement déclenche une tempête médiatique et politique qui conduit rapidement les autorités à décréter une expulsion de toutes les amazones présentes sur le territoire états-unien.
Comme souvent dans les série scénarisée par Tom King, l’actualité influence le récit. Si toute œuvre est toujours le produit de son temps, c’est particulièrement visible dans son cas. Ainsi, on voit bien la spirale qui conduit à la déclaration hors-la-loi des amazones et en particulier de la plus célèbre d’entre elles. Le traitement médiatique de la situation n’est clairement pas objectif, ni neutre. Les médias sont utilisés comme un moyen de manipulation de l’opinion. Un élément que l’on retrouve dans l’event en cours chez l’éditeur au moment de la rédaction de cette chronique : Absolute Power. Même si dans ce dernier cas, il s’agit d’une manipulation franchement moins subtile, avec une grosse dose de fausses vidéos bricolées par IA.
On plonge aussi joyeusement dans l’idée que les États-Unis ne sont qu’une façade, dirigée en sous-main par une puissance occulte. Cependant, il n’y a pas ici de complot wokisto-progressiste dirigé par Soros (ou n’importe quelle autre figure juive qui semblent tant plaire à tous les frappadingues qui défendent ces théories). On est clairement face à une puissance conservatrice qui souhaite bien garder le contrôle d’une situation qui est en train de lui échapper.
J’ai trouvé plein de bonnes choses dans les différents numéros de ce recueil. Dans le deuxième numéro, on a un récit parallèle sur deux époques mettant en scène l’incroyable volonté de Diana. Le quatrième épisode raconte une très touchante rencontre entre elle et un enfant malade et illustre sa capacité à aimer et aider autrui. Si l’adversaire principal ne se dévoile que petit à petit, il est secondé par une véritable tête à claque avec Steel qui m’énerve prodigieusement et que j’ai donc grand plaisir à voir se faire botter le train par Wonder Woman.
Visuellement, c’est magnifique. Daniel Sampere livre des planches de toute beauté et il est clairement dans la catégorie des artistes qui s’adaptent parfaitement au style d’écriture de Tom King. On n’échappe donc pas au gaufrier en trois par trois, aux séries de trois ou quatre cases quasiment identiques avec quelques détails qui ponctuent une conversation, etc. Et ça fonctionne très bien. Il y a une scène dans et à la sortie d’un ascenseur qui m’a beaucoup amusé dans sa mise en scène. On a aussi son lot de splash page et de séquence d’action où le super de super-héroïne n’est pas usurpé. Ça se balance des trucs énormes à la tronche, ça casse, ça broie, ça pilonne, bref ça ne lésine pas sur le budget « destruction ». Et c’est un plaisir à voir. Surtout que je m’épargne le mixage sonore insupportable des blockbusters en salle qui me rendent usuellement la chose un poil inaudible tant il y a de décibels. Et au milieu de tout ça, Sampere dessine très bien Diana et les émotions qu’elle porte : joie, ennuie, amour des autres, agacement, gentillesse, etc.
Bref, j’ai pris énormément de plaisir à lire ce premier volume sous la direction de Tom King et je suis très curieux de voir comment les choses vont évoluer par la suite.
Note : ce volume correspond à peu près au premier volume de la série Wonder Woman : Hors-la-loi publié en français chez Urban Comics
Wonder Woman – volume 1 – Outlaw
écrit par Tom King
dessiné par Daniel Sampere
colorisé par Tomeu Morey
lettré par Clayton Cowles
éditions DC Comics (anglais) Urban Comics (français)
168 pages (anglais) 208 pages (français)