Je lis peu d’auteurs francophones et encore moins d’autrices. C’est donc presque un événement exceptionnel quand je lis une autrice francophone dont je n’ai encore rien lu. Ce qui est le cas avec cette novella d’Audrey Pleynet.
La narratrice, dont je ne crois pas que le nom soit révélé au cours du récit, vit à bord d’une station spatiale qui sert de lieu de rencontre entre les différences espèces sentientes de la galaxie. Elle nous raconte son histoire, son enfance et son âge adulte, au cœur d’un jeu de pouvoir et de quelques secrets qu’elle protègerait.
Le récit demande un petit temps d’adaptation pour plonger dans le point de vue de la narratrice et sa façon de raconter l’histoire. Mais une fois pris le pli, j’ai trouvé le récit très beau à suivre. Les émotions de la narratrice ressortent bien et je ressens vraiment son attachement à cette station et à l’idée qu’elle porte.
Le cadre de cette histoire est intéressant. La station ressemble à certains lieux connus de la SF, comme Point Central ou Babylon 5, sans en être une simple copie. Le contrôle des environnements a son importance et on le ressent bien. C’est un lieu de rencontre et de convergence ou au contraire de confrontation. Notamment une divergence profonde entre les Fusionnistes qui veulent profiter de la technologie pour s’affranchir des barrières entre espèces et les Spéciens qui sont favorable à une nette séparation. Il y a comme une sorte d’opposition entre une vision « continue » et une vision « discrète » du spectre des espèces sentientes.
L’une des forces de cette novella tient justement à la description des espèces que fait Pleynet. On y trouve de tout, c’est riche, varié et ça n’a aucunement à rougir face aux grands noms du genre. J’ai énormément apprécié ce point. L’aspect origine multiple des Fusionnistes est vraiment bien représenté et ça se lit sans problème.
Le récit parle du présent et du passé en alternant les époques. Là aussi, après un petit temps d’adaptation je m’y suis bien adapté. L’opposition entre les deux factions se dessine petit à petit. L’implication de la narratrice apparait progressivement et on saisit peu à peu les objectifs de son antagoniste. La trame « politique » est joliment emmêlée avec l’histoire des relations amicales, amoureuses et familiales de sa protagoniste. Ainsi que ses angoisses sur la maternité. Tout ça en brodant un petit leitmotiv sur une chanson traditionnelle.
Bref, voilà un texte joliment écrit, avec un fond riche et varié, une forme qui demande de s’y plonger un peu sérieusement, un décor plein de diversité et dont on sent bien que les dimensions déplacent la vision de la narratrice. Tout ça avec une sensation d’humanité bien présente. Si la construction de l’univers et des espèces m’évoque entre autres Laurent Genefort, la forme du récit et son rythme me rappellent cette étrange expérience de lecture que fut Anamnèse de Lady Star de L. L. Kloetzer. Avec cette novella, Audrey Pleynet mérite largement sa place à leur côté.
Rossignol
d’Audrey Pleynet
illustration d’Aurélien Police
éditions Le Bélial
131 pages (poche)
disponible en numérique chez 7switch