J’ai déjà dit du bien ici de Ken Liu, notamment pour sa novella L’homme qui mit fin à l’histoire. Et si j’ai été un peu déçu par Le regard, je continue tout de même mon parcours dans ses novellas avec Toutes les saveurs.
Idaho City, fin du 19e siècle, conquête de l’Ouest, fièvre de l’or. Ken Liu nous trace un récit autour d’une communauté chinoise qui s’installe dans des États-Unis en expansion et qui essaie de s’intégrer.
L’histoire est principalement vécue par le point de vue de Lily, fille d’un marchand qui est aussi propriétaire de logements hébergeant des émigrés chinois. La jeune fille est très intéressée par la cuisine et l’histoire mythique que véhicule ces curieux étrangers.
Comme dans d’autres textes, l’auteur s’inspire de l’histoire et des mythologies de la Chine, qu’il partage aux lecteurices. Il mêle ça assez bien avec la situation de ces émigrés dont l’existence n’est pas toujours simple dans un pays dont une partie des habitants leur est hostile.
Comme son titre l’indique, il est aussi question de cuisine dans ce récit. Lily fait la découverte de celle de la cuisine chinoise, qui lui offre plein de nouvelles expériences. J’ai trouvé que Liu rendait bien les sensations que procurent ces nouveautés culinaires pour la jeune fille.
Au final, je classerai probablement le texte dans le fantastique, puisqu’on y trouve une scène qui ne peut pas s’expliquer complètement par la rationalité. Mais dans l’ensemble, le récit ne fait que frôler le territoire du fantastique. L’histoire de Guan Yu est bien sûre très mythifiée, mais elle n’est qu’un récit dans le récit. Le principal étant la rencontre de deux cultures, une découverte culinaire et les aléas de l’intégration, dans un contexte historique particulier dont l’auteur reparle en guise d’épilogue.
J’ai bien aimé ce texte. La plume de Ken Liu se lit très agréablement et j’apprécie la façon dont il mêle des éléments de l’histoire et de la mythologie chinoise dans son récit sur des émigrés qui emmènent avec eux un petit morceau de leur culture. Le seul défaut que je trouve à cette novella ne vient pas de l’auteur mais de sa traduction française. Le texte contient le texte d’une chanson traditionnelle, Finnegan’s Wake, dont les paroles ne sont pas traduites ni le sens expliqué par une note quelconque, alors qu’elle occupe deux pleines pages. C’est dommage mais heureusement pas rédhibitoire pour apprécier ce livre.
Toutes les saveurs (All the Flavors)
de Ken Liu
traduit par Pierre-Paul Durastanti
illustration d’Aurélien Police
éditions Le Bélial
125 pages (poche)
disponible en numérique chez 7switch