Après Infinitys Wars, j’arrive enfin au septième et dernier volume de la série d’anthologies Infinity Project, dirigée par Jonathan Strahan. Voyons donc ce que l’on trouve dans cet ultime opus.
On commence avec Foxy and Tiggs de Justina Robson, une autrice que je connaissais pas encore. On y suit deux personnages un peu étrange qui procèdent à une enquête pour élucider une mort étrange. C’est assez sympathique, principalement par l’univers que ça décrit. Cependant, c’est peut-être un poil court, l’enquête étant pliée en deux temps trois mouvements.
On passe ensuite à Intervention de Kelly Robson, dont j’ignore si elle a un lien de parenté avec la précédente. Ici, on suit le parcours d’un personnage dont le métier est d’élever des enfants. Dans un futur où les communautés humaines éparpillées à travers le système solaire semblent ne plus le faire directement au sein d’une famille. On voyage un peu. Si on a vraiment envie d’en savoir plus sur l’univers dans lequel a lieu le récit, on regrettera peut-être que ce dernier ne soit pas plutôt de la forme novella. Cependant, ça m’a suffit pour m’attacher un minimum au personnage principal et à ses préoccupations.
On retrouve Paul McAuley déjà aperçu précédemment chez l’anthologiste, avec son univers de la Guerre tranquille. Dans Nothing Ever Happens on Oberon, on s’intéresse à une ado / jeune adulte dont la vie sans histoire se retrouve chamboulée par l’atterrissage d’une capsule de sauvetage sur la satellite d’Uranus où elle habite. Là aussi, c’est un texte qui aurait facilement pu devenir une novella si l’auteur avait développé la dernière partie de l’intrigue. Mais je pense qu’on a l’essentiel, on voit bien comment la vie de la protagoniste est influencée par cette rencontre, nul besoin d’en faire cinquante pages de plus.
Vient ensuite Prophet of the Roads, de Naomi Kritzer, la troisième autrice que je découvre par cette anthologie. On y voit la relation un peu particulière qu’entretient lea narrateurice (j’avoue que je ne sais plus le genre du personnage et en reparcourant le texte, je n’ai pas trouvé d’indice allant dans un sens particulier) avec une IA récupérée sur un champ de bataille. Une intelligence qui est investie d’une mission particulière que lea narrateurice essaie de l’aider à accomplir. J’ai bien aimé l’idée derrière le récit et la façon dont c’est fait. Il y a un aspect religieux / mystique qui m’a bien plu.
Alastair Reynolds est un grand habitué du blog en général et des anthos de Jonathan Strahan en particulier. Dans Death’s Door, on suit un trio de personnages, dont deux essayent de convaincre le troisième qu’il n’est peut-être pas nécessaire de risquer sa vie de façon quasi-suicidaire. L’auteur nous emmène faire un petit tour à travers le système solaire. On retrouve bien sa patte : il y a un peu question d’art, les humains ont atteint des capacités de modification très avancées, on explore des environnements particuliers offrant de beaux spectacles, etc. Sans surprise, j’ai bien aimé, la résolution de l’intrigue n’est pas celle qu’attendaient les personnages et la fin laisse curieux de ce qu’il se passera plus tard.
Je connaissais jusqu’ici Seanan McGuire uniquement par le biais de sa série de thriller politique en univers zombie, Feed, publiée sous le pseudonyme de Mira Grant. Je découvre maintenant sa plume sur une nouvelle, avec Swear Not by the Moon. Un père et sa fille arrivent sur Titan, transformée en parc d’attraction planétaire par une richissime visionnaire. J’ai bien aimé ce texte. L’autrice dévoile au fur et à mesure le contexte de cet univers, ce qui évite un trop gros pavé d’explication tout en accompagnant bien le récit. J’ai beaucoup apprécié la façon dont elle masque puis dévoile un élément. Parfois, bien écrire c’est aussi savoir ne pas dire quelque chose tout de suite. La résolution de l’intrigue est un peu rapide… mais je la trouve pourtant cohérente avec le pouvoir de certain personnage : une immense richesse peut vous autoriser quantité de raccourci. Ce n’est pas la réalité actuelle qui peut se permettre de contredire la fiction sur ce point.
Je retrouve ensuite l’un de mes auteurs favoris : Stephen Baxter. Celui-ci nous emmène dans un voyage aux confins du système solaire dans Last Small Step. Comme on est chez Baxter, on échappe pas à un poil de hard-science, mais très digeste. D’une part, il ne va pas chercher des concepts trop complexes. D’autre part, il présente ça assez simplement par le biais des personnages qui ont un de ces fameux dialogues où l’un explique quelque chose à l’autre, pour le bénéfice des lecteurices. L’auteur fait ça avec un minimum d’excuse relative à la situation particulière que vivent les personnages, ce qui m’évite un agacement à ce sujet. Merci. L’idée derrière la nouvelle est improbable, incroyable et j’avoue que je suis encore impressionné de voir Baxter arriver à dénicher un truc pareil en lisant Les Voyages de Gulliver de Jonathan Swift. Chapeau l’artiste !
Kristine Kathryn Rusch fait partie des plumes que j’ai retrouvé régulièrement dans cette série d’antho. Elle est présente aussi dans ce dernier volume avec Once on the Blue Moon, une histoire où l’on suit une ado qui voyage avec ses parents dans un cargo spatial. Mais les routes de l’espace sont parfois mal fréquentées. La nouvelle n’a rien de renversant et est assez légère, mais j’y ai pris plaisir.
On continue avec les habitués puisque le texte suivant, A Portrait of Salai, est du à Hannu Rajaniemi. L’idée développée est intéressante, puisqu’il s’agit de réaliser des œuvres d’art sur des dimensions qui impliquent de manipuler les corps célestes. Cependant, je n’ai pas été très convaincu par la forme, peinant notamment à comprendre ce qui motive les personnages dans ce récit.
Dans Longing for Earth, Linda Nagata nous propose de suivre un voyageur qui arpente les très nombreux habitats développés par les humains à travers tout le système solaire, cherchant à s’imprégner des ambiances réelles, alors que ce futur voit les gens se tourner vers une virtualisation une fois passé un certain âge. J’aime bien aimé ce texte, où l’autrice retranscrit bien l’ambiance et les sentiments du personnage. On a quelques idées de SF qui servent de fond, mais le propos est centré sur l’humain.
Je reviens ensuite sur les plumes que je découvre avec celle de Fran Wilde. Dans The Synchronist, on suit le parcours d’une fille dont le père disparait et qui se lance dans une recherche de mesure la plus exacte du temps. Cet aspect a son importance dans le futur que décrit l’autrice, car c’est un élément central du déplacement entre les mondes. Le récit est bien agencé, avec des interludes représentés par des notices d’un musée futur. Et j’ai bien aimé la façon dont tout ça se termine.
Autre première expérience pour moi, avec Lavie Tidhar. Dans Talking to the Ghost at the Edge of the World, on voit ce qu’il peut advenir des défunts dans un futur où un implant s’interface avec le cerveau. Le texte est intéressant, notamment dans son écriture du personnage principal et des choix variés que font les gens à ce sujet. Mais je lui ai trouvé un petit goût de trop peu.
Encore un nouvel auteur pour moi avec Cloudsong de Nick Wolven. L’eau est capitale à la vie et il est fort probable que ce soit toujours le cas à l’avenir. C’est en tout cas exact dans le futur qu’imagine l’auteur. Il est donc important d’en trouver des ressources hors de la Terre lorsque l’on colonise le système solaire. Mais parfois les réglementations peuvent empêcher l’exploitation de certaines ressources, ce qui contrarie bien le personnage principal de ce récit. Ce texte a un petit côté vertigineux tout en parlant d’art, ce qui m’évoque un peu Alastair Reynolds. J’ai bien aimé.
L’ouvrage se termine avec un auteur déjà vu plusieurs fois chez l’anthologiste : Peter Watts. Dans Kindred on suit une étrange conversation dont on n’a qu’un seul côté. L’auteur part assez loin et malgré sa forme le texte se lit bien.
Cette série d’anthologies se termine donc avec ce septième volume. Un sacré défi que Strahan a bien relevé. Cet ultime opus est dans la continuité des précédents : des hauts, quelques bas, mais dans l’ensemble pas mal de textes qui m’ont plu et qui m’ont émerveillé. Je vais pouvoir continuer à dépiler mon stock de volume dirigés par l’anthologiste. Le prochain sera probablement Made to Order.

Infinity’s End
anthologie dirigée par Jonathan Strahan
illustration d’Adam Tredowski
édition Solaris
349 pages (grand format)